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Droit Pénal et Procédure Pénale > Documentation > Communiqué De Presse Du Tribunal Fédéral « Oui Cest Oui » Ne Sapplique Pas Au Droit

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, « Oui, c'est oui » ne s'applique pas au droit pénal en vigueur en matière sexuelle - Arrêt du 28 mars 2022 (6B_894/2021)

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, « Oui, c'est oui » ne s'applique pas au droit pénal en vigueur en matière sexuelle - Arrêt du 28 mars 2022 (6B_894/2021)

Résumé : le droit pénal en vigueur en matière sexuelle ne permet pas l'interprétation selon laquelle l'absence de consentement lors de relations sexuelles (« oui, c'est oui ») serait suffisante pour une condamnation pour contrainte sexuelle ou viol. Cela violerait le principe « pas de peine sans loi ».

 

En septembre 2020, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a condamné un prévenu pour contrainte sexuelle et viol.

Le prévenu a formé appel contre cette décision à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise (la Cour cantonale), qui l'a acquitté de ces chefs.

La femme concernée a porté cette décision devant le Tribunal fédéral, qui rejette le recours et confirme l'acquittement du prévenu.

 

Le Tribunal fédéral s'est d'abord penché sur l'établissement des faits.

Il est incontesté que les parties ont eu des relations sexuelles.

Était par contre contesté le déroulement des faits, notamment si les relations sexuelles étaient consenties par la recourante.

La Cour cantonale a estimé que la crédibilité des déclarations des deux parties était moyenne, d’égale façon.

Ainsi, la Cour cantonale a établi les faits sur la base des quelques éléments objectifs à disposition ainsi que de ceux communs aux récits des parties ou, à défaut, ceux concédés par l’une ou par l’autre.

Après un examen des considérants de la Cour cantonale, le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que l'établissement des faits à laquelle a procédé la Cour cantonale n'est pas manifestement insoutenable.

 

La recourante estime ensuite qu'il conviendrait d'interpréter les articles 189 (contrainte sexuelle) et 190 (viol) du Code pénal suisse (CP) comme rendant punissable tout acte d'ordre sexuel non consensuel (« oui, c'est oui »).

Cela découlerait de la jurisprudence de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et de la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (Convention d'Istanbul).

 

Selon la Convention d'Istanbul, le consentement doit être donné volontairement comme résultat de la volonté libre de la personne considérée dans le contexte des circonstances environnantes (article 36 paragraphe 2).

Les États signataires sont libres de décider de la formulation exacte de la législation et des facteurs constitutifs d’un consentement libre.

Le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que l'adéquation de la formulation des articles 189 et 190 CP aux exigences de la Convention d'Istanbul peut demeurer indécise en l'espèce, dite convention ne créant pas de droits subjectifs pour la personne qui l'invoque.

 

S'agissant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH), il découle des articles 3 et 8 CEDH l’obligation positive pour les États d’adopter des dispositions punissant de manière effective tout acte sexuel non consensuel, y compris lorsque la victime n’a pas opposé de résistance physique.

Les États jouissent incontestablement d'une large marge d'appréciation.

Selon la CourEDH, de nombreux systèmes juridiques définissent toujours le viol à partir des moyens que l'agresseur utilise pour obtenir la soumission de la victime.

De plus, la CourEDH n'examine pas si le cadre législatif de manière générale est suffisant dans le pays concerné mais si, dans le cas qui lui est soumis, les faits dénoncés sont couverts par le cadre législatif et si la victime présumée a pu bénéficier d'une protection effective de ses droits.

Finalement, la CourEDH ne s'est pas penchée sur un cas, où seule l'absence d'expression du consentement était litigieuse en présence d'une législation qui ne punit pas tout acte d'ordre sexuel non consensuel.

 

Même si la jurisprudence ne pose pas des exigences très élevées en la matière, la contrainte est l'un des éléments constitutifs des articles 189 et 190 CP.

Pour qu'il y ait contrainte en matière sexuelle, il faut que la victime ne soit pas consentante, que l'auteur le sache ou accepte cette éventualité et qu'il passe outre en profitant de la situation (en exerçant une pression d'ordre psychique) ou en utilisant un moyen efficace (entre autres menace ou violence).

Il n'est pas nécessaire que la victime soit mise hors d'état de résister ou que l'auteur la maltraite physiquement.

L'interprétation suggérée par la recourante omet la contrainte.

Le principe de la légalité (« pas de peine sans loi ») impose la prise en compte de cet élément constitutif.

Sa suppression relève le cas échéant de la compétence du législateur.

Dans le cadre de la révision du droit pénal en matière sexuelle actuellement en cours, la Commission des affaires juridiques du Conseil des États privilégie, finalement, le maintien du refus (« non, c'est non »).


Contact : Peter Josi, Chargé des médias
Tél. +41 (0)21 318 91 53; Fax +41 (0)21 323 37 00 Courriel : presse@bger.ch


Remarque : Le communiqué de presse sert à l'information du public et des médias. Les expressions utilisées peuvent différer du libellé de l'arrêt. Pour la jurisprudence, seule la version écrite de l'arrêt fait foi.

L'arrêt est accessible à partir du 11 mai 2022 à 13:00 heures sur www.tribunal-federal.ch : Jurisprudence > Jurisprudence (gratuit) > Autres arrêts dès 2000 > entrer 6B_894/2021.

iusNet DP-PP 09.05.2022

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, « Oui, c'est oui » ne s'applique pas au droit pénal en vigueur en matière sexuelle - Arrêt du 28 mars 2022 (6B_894/2021)

Communiqué de presse du Tribunal fédéral, « Oui, c'est oui » ne s'applique pas au droit pénal en vigueur en matière sexuelle - Arrêt du 28 mars 2022 (6B_894/2021)

Résumé : le droit pénal en vigueur en matière sexuelle ne permet pas l'interprétation selon laquelle l'absence de consentement lors de relations sexuelles (« oui, c'est oui ») serait suffisante pour une condamnation pour contrainte sexuelle ou viol. Cela violerait le principe « pas de peine sans loi ».

 

En septembre 2020, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a condamné un prévenu pour contrainte sexuelle et viol.

Le prévenu a formé appel contre cette décision à la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise (la Cour cantonale), qui l'a acquitté de ces chefs.

La femme concernée a porté cette décision devant le Tribunal fédéral, qui rejette le recours et confirme l'acquittement du prévenu.

 

Le Tribunal fédéral s'est d'abord penché sur l'établissement des faits.

Il est incontesté que les parties ont eu des relations sexuelles.

Était par contre contesté le déroulement des faits, notamment si les relations sexuelles étaient consenties par la recourante.

La Cour cantonale a estimé que la crédibilité des déclarations des deux parties était moyenne, d’égale façon.

Ainsi, la Cour cantonale a établi les faits sur la base des quelques éléments objectifs à disposition ainsi que de ceux communs aux récits des parties ou, à défaut, ceux concédés par l’une ou par l’autre.

Après un examen des considérants de la Cour cantonale, le Tribunal fédéral arrive à la conclusion que l'établissement des faits à laquelle a procédé la Cour cantonale n'est pas manifestement insoutenable.

iusNet DP-PP 09.05.2022

 

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